« Rattrapée malgré moi au détour d’un chemin
Par une lumière douce, une musique, un parfum
Me voilà transportée au cœur de ma jeunesse
À mi-chemin entre nostalgie et tristesse !
Que deviennent nos bonheurs et nos éclats de rire
Quand tournent les aiguilles de l’horloge de l’avenir ?
Où sont passés nos larmes, nos cris et nos douleurs,
Quand la vie, peu à peu, les voile de pudeur?
Reste t-il quelque chose des passions, des étreintes,
Quand le temps les maltraite, les polit, les éreinte ?
Et puis tous les regrets, les hontes, les remords,
Disparus à jamais ? Ou bien vivants, encore ?
Comment croire oubliées les pages du passé
Quand les mots d’une chanson peuvent les ressusciter ?
Comment trouver la force ou l’envie de sourire,
Quand on traîne derrière soi le poids des souvenirs ?
Comment aimer encore, comment briser nos chaînes,
Quand un geste, un sourire, fait renaître nos peines ?
Puis je me laisser séduire, accorder ma confiance
Quand les voix du passé m’intiment la prudence ?
Comment être sincère, droite, honnête et franche
Quand toutes mes amours mortes me tirent par la manche,
Me ramènent en arrière, me racontent l’histoire
Et me révèlent la fin dans l’reflet du miroir ?
Et puis, tout au contraire, comment pleurer encore
La perte d’un être cher, les peines, les coups du sort
Quand les mois, les années nous volent nos pires chagrins,
Les noyant sans pitié sous tous nos lendemains ?
Comment vivre au présent ? Avancer, s’émouvoir,
Quand on sait qu’un ’après’ nous attend un beau soir ?
Comment ne pas laisser glisser les sentiments
Quand on sait qu’en cédant, ils nous blesseront sûrement ?
De toutes mes libertés, celle d’aimer est la pire
Puisque, quoi qu’il arrive, elle me fera souffrir !
Alors c’est dans le rêve, le fantasme, l’illusion
Que je cherche parfois l’impossible passion,
Si brûlante qu’elle chasserait les regrets et les larmes,
Si puissante qu’elle briserait mes chaînes de son charme !
Mais comme les reflets dans l’eau d’une rivière,
Il suffit d’y lancer un caillou, une pierre,
Où d’une simple caresse d’un Zéphyr malicieux
Pour que le rêve meurt à jamais dans mes yeux !
Prisonnière de ma vie, de tous mes souvenirs,
Saurais je un jour encore me tourner vers l’avenir ?
Pourrais je, comme une fleur sur l'onde vagabonde,
Voyager dans la vie comme elle parcourt le monde ?
Ou comme le lotus, dans la vase et le noir,
Resterais je enchaînée à mon cœur, mon histoire ? »